Cet article tente d’analyser sous un angle politique et d’un point de vue de la théorie de l’état – donc constitutionnel – la situation politique et institutionnelle au Congo-Brazzaville. Peut-on parler dans certains cas de l’inexistence de l’Etat ? Si oui, quels en sont les conséquences ? Enfin, comment devrait réagir un homme politique dans un tel contexte ? [Sur la photo, en premier plan le nouveau leader de l’Opposition politique authentique au Congo-Brazzaville, le docteur en économie Parfait Kolélas, originaire du Sud, département du Pool.]
La République du Congo, couramment appelé Congo-Brazzaville est dans l’impasse politique depuis la réélection contestée du Président de la République le Général Denis Sassou N’Guesso en Mars 2016. Depuis, en dépit du refus manifeste des grandes puissances occidentales (France, USA etc.) d’avaliser officiellement cet état de fait, l’homme « fort » de Brazzaville a su imposer la donne aussi bien vis-à-vis de ces derniers que de l’opposition congolaise muselée par la force et la répression des plus féroces, digne d’un régime dictatorial ( emprisonnement des principaux leaders de l’opposition, violation quotidienne des droits de l’homme, épuration ethnique des Bakongo-Laris dans le pool etc.), bref un véritable terrorisme « d’état » face à une communauté internationale absente et muette.
En sus de la cacophonie orchestrée par le pouvoir de Brazzaville, la véritable Opposition réunie hier au sein de l’IDC-FROCAD Composante J3M a décidé de faire marche arrière en appelant les populations à boycotter les élections législatives et locales de juillet 2017. Et se faisant d’ouvrir un boulevard royal au Parti communiste au pouvoir (PCT – Parti congolais des travailleurs). En effet, le PCT – le parti au pouvoir –, désormais rebaptisé par la majorité des congolais (Parti congolais des tricheurs) serait sur le pied de guerre, et comme à l’élection présidentielle de l’année dernière, le parti au pouvoir serait déterminé à emporter coûte que coûte (même par le vol et la tricherie) la majorité absolue au Parlement.
Toutefois, si les principaux tenants de la Fédération IDC-FROCAD J3M ont décidé de s’exclure du processus électoral dans le pays, d’autres principaux leaders de l’opposition congolaise (Mabio-Zinga etc.), et deux ex-candidat à l’élection présidentielle de 2016 (Parfait Kolélas, et Tsaty Mabiala) ont par contre décidé de montrer aux yeux de la communauté nationale et internationale le vrai visage du pouvoir de Brazzaville en participant à ces joutes électorales. Ainsi, organisé au sein de son parti politique l’Union des démocrates et Humanistes (UDH-Yuki), l’ancien ministre de la Fonction Publique Dr. Parfait Kolélas a présenté en indépendant plusieurs candidats aux législatives et aux locales. Pareillement, l’Union panafricaine pour la démocratie sociale (UPADS) que dirige Tsaty Mabiala a présenté un nombre conséquent de candidats aux législatives et aux locales.
Selon les résultats du 1er tour publiés Jeudi 20 juillet 2017 par le Ministère de l’intérieur (le deuxième tour étant prévu le 30 juillet 2017), le Parti au pouvoir (PCT) a obtenu près de 70 sièges sur 151. L’UDH-Yuki 8 sièges et l’UPADS 3 sièges. Dans l’ensemble plus de 93 députés ont été élus dès le 1er tour. Notons par ailleurs que, le pouvoir de Brazzaville peut déjà s’assurer d’avoir la majorité absolue au Parlement, évitant ainsi une cohabitation, puisse que de nombreux députés élus en indépendant ou à la tête de quelques partis sont membres à part entière de la majorité présidentielle RMP (Rassemblement pour la majorité présidentielle). Tel est le cas de l’UMP (avec 2 députés élus dès le 1er tour) du Ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé des relations avec le parlement, Digne Elvis Tsalissan Okombi.
Quelles analyses ou quelles leçons peut-on tirer du processus électoral actuel en République du Congo, emprisonné d’ailleurs dans le piège d’un Pouvoir répressif qui tient coûte que coûte et en dépit de la volonté véritable du vrai corps électoral, à demeurer à la tête de l’état, qui est de facto pris en otage par le régime de Brazzaville ? Tout d’abord, il est important de rappeler au lecteur que nous sommes partisans de la logique qui voudrait que dans de telles circonstances (mise en quarantaine de l’état ou prise de pouvoir de façon inconstitutionnelle), et au vu du sens que l’on devrait donner à la notion « Etat » dans un régime démocratique et républicain, c’est-à-dire une entité fondée sur la volonté du peuple électeur ; capable de garantir l’inviolabilité des droits fondamentaux politiques, et des droits universels de l’homme ; capable d’organiser objectivement et dans le respect de la Loi Fondamentale du pays, les institutions, la séparation nécessaire des pouvoir tout en garantissant par des moyens légaux et coercitifs leur totale indépendance dans l’exercice de leurs prérogatives constitutionnelles. Bref, lorsque ces conditions énumérées plus hauts ne sont pas scrupuleusement respectées et garanties, l’Etat cesse d’exister. Les preneurs d’otages devront en assumer par conséquent toutes les conséquences. Cependant, les torts occasionnés dans ces circonstances par l’utilisation inconstitutionnelle des moyens régaliens de l’Etat ; à la restauration d’un régime démocratique et républicain, ces torts doivent nécessairement être réparées par principe car l’Etat c’est tous (le peuple). Et les preneurs d’otages devront être poursuis en justice par tous les moyens.
Partant, en refusant de participer à ces élections politiques organisées par un régime constitutionnellement illégitime, la Fédération IDC FROCAD J3M n’a pas eu tort de prendre position et de poser des préalables au pouvoir en place (libération des prisonniers politiques, assainissement du fichier électoral, organisation d’un dialogue franc et démocratique sur le processus électoral dans le pays, l’arrêt de l’épuration ethnique des Bakongo-Laris dans le Pool – le génocide du Pool – etc.) avant de s’engager dans la course aux législatives et aux locales.
Si constitutionnellement (par rapport à ce qui a été dit plus haut) une partie de l’opposition a tout fait raison de prendre position contre l’organisation de ces élections ; politiquement parlant, cela constitue une grave erreur de leur part. Car, en observant l’histoire politique électorale du pays sur ces 15 dernières années, on peut constater plusieurs faits qui auraient dû faire réfléchir l’opposition avant qu’elle prenne pareille décision. En effet, depuis 2002, le Pouvoir de Brazzaville à organiser les élections politiques dans le pays en biaisant dès le départ les conditions universelles et basiques qui doivent encadrer toutes types d’élection politiques dans un régime démocratique et républicain (découpage électoral scandaleux – avec le Nord du pays incompréhensiblement mieux doté que le Sud qui contient plus de 70% de la population du pays – ; un fichier électoral grotesquement irréel etc.). Dans ces conditions, le pouvoir de Brazzaville s’est organisé tant bien que mal à emporter successivement toutes les élections organisées dans le pays (Présidentielle, législative, sénatoriale, locale) jusqu’à celles de 2016 (présidentielle) et 2017 (législatives et locales). En outre, au sujet de la présidentielle, il est important de noter que progressivement et à chaque élection présidentielle, on a pu constater que le régime de Brazzaville est de plus en plus conscient de son impopularité d’où le léger changement que l’on peut noter sur les résultats qu’il annonce depuis ces 15 dernières années. En 2002 Denis Sassou N’Guesso est élu miraculeusement avec 90% des voix ; en 2009 avec 70% et en 2016 avec 60%. Si ces résultats sont surement frauduleux et hautement inconstitutionnels, face à l’inexistence d’un Etat capable de faire respecter la volonté du Peuple, tout leader politique doit logiquement s’adapter au contexte actuel pour affuter d’autres stratégies de conquête du pouvoir. La participation massive et regroupée de l’Opposition authentique aux joutes électorales organisées par le régime dictatorial de Brazzaville (comme à la présidentielle volée de Mars 2016) demeure la seule et véritable stratégie d’étouffement capable d’éradiquer progressivement mais sûrement ce régime qui est en train de commettre le premier génocide du XXIème siècle contre les populations Bakongo-Laris dans le pays avec la guerre du Pool. Compter sur l’insurrection populaire est une stratégie digne d’amateurs politiques, car nul ne peut savoir l’heure et la date exacte à laquelle va se réaliser pareil phénomène sociopolitique d’une incroyable imprévision. Par contre, une Opposition doit obligatoirement être à l’écouter de la population et s’efforcer tant bien que mal de répondre aux besoins auxquels le pouvoir en place a dû mal à répondre (Mises en place de politiques entrepreneuriales capables d’encourager l’émancipation sociale des populations par le travail ; encourager les jeunes à se former et à s’intéresser à l’agriculture etc.). Ces activités permettraient de maintenir le vrai peuple en alliée et ce dernier n’hésiterait pas à renouveler sa confiance à une Opposition qui se montrera plus pragmatique et stratégique. Offrir comme cap et perspective aux populations l’insurrection est une erreur. Personne ne peut programmer un soulèvement populaire.
Enfin, paradoxalement au Congo Brazzaville, les leaders politiques qui ont souvent appelées au boycott des élections politiques dans le pays sont majoritairement originaires du Nord. Cet aspect sociologique est important pour mieux comprendre les enjeux politiques au Congo Brazzaville. Denis Sassou N’Guesso est originaire du Nord et depuis toujours il organise et gère le pays sur une base tribale ou ethnique, en favorisant le Nord et ses ressortissants et ce contre les populations du Sud qui font face par tous les moyens à ce régime infame. Et force est de constater que les leaders politiques du Sud sont les véritables partisans de cette inclination progressive du Pouvoir de Brazzaville au fil des ans. Il serait donc logique que les leaders politiques du Nord opposés au clan Denis Sassou N’Guesso s’associent (le Prof. Zacharie Bowao, l’ancien Ministre des Finances Mathias Dzon, le Haut fonctionnaire Blanchard Oba, l’ancien ministre Mierassa etc.) avec ceux du Sud afin de bâtir un seul front capable de rétablir la république et la démocratie au Congo-Brazzaville. Si ce point de conjonction n’est pas faisable, il faudra conclure que les leaders politiques du Nord sont dans une logique cachée et honteuse de conservation du pouvoir par le Nord et qui dit conservation du Pouvoir politique par le Nord dit sociologiquement parlant au Congo-Brazzaville falsification des résultats sortis des urnes. Car, on ne le dira jamais assez, le congolais vote d’abord par appartenance ethnique. Toutefois, cette réalité sociologique a tendance à être contredite par les populations du sud et notamment ceux des départements du Pool et du Kouilou qui votent non pas uniquement par appartenance ethnique, mais en tenant compte également du programme politique et de l’envergure ou le charisme des candidats. Le cas le plus emblématique de ces dernières années est par exemple l’adhésion massive des populations du Sud vis-à-vis du Candidat à la présidentielle de 2016 Jean Marie Michel MOKOKO arrivé en 2ème position derrière Parfait Kolélas, selon les vrais résultats sortis des urnes. Denis Sassou N’Guesso étant sorti 4eme avec un peu plus de 8% des voix, mais déclaré réélu avec plus de 60% par le ministère de l’intérieur (Résultats fustigées par la communauté internationales). Le Canada reconnait officiellement Denis Sassou N’Guesso comme un dictateur politique.
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