Sénégal: Réalismes ou phantasmes? Crises politiques en perspective…

Le Sénégal fait sans nul doute partie des rares pays les mieux avancés démocratiquement parlant en Afrique Subsaharienne francophone et dans la zone d’influence française dite françafrique. Dans cet article, nous tenterons de comprendre le pourquoi? Le quand? Et le comment? de la crise politique en perspective dans ce pays longtemps considéré comme un exemple d’apaisement politique et d’alternance démocratique à la tête de l’État.


   Tout d’abord, il est important de rappeler que l’alternance démocratique est une règle acceptée par la classe politique sénégalaise en dépit de quelques péripéties politiques ayant affecté les parcours d’hommes d’État comme Léopold Sédar Senghor (1960-1980), Abdou Diouf (1981-2000) et Abdoulaye Wade (2000-2012). Ceci dit, ceux des quelques analystes politiques qui ont fait le choix d’aligner les événements en cours au pays de la «Téranga», à la réalité institutionnelle et «géopolitique» en présence dans la sous-région d’Afrique Subsaharienne compte tenu du degré de dépérissement constitutionnel constaté avec des changements constitutionnels répétitifs ayant systématiquement conduit à des troisièmes mandats présidentiels inopportuns et fortement contestés tels qu’en Côte-d’Ivoire ou en Guinée-Conakry. S’ils ont le mérite d’avancer des réflexions pour le moins légitimes dans ce sens; nous estimons en revanche que la culture sociopolitique ancrée dans l’espace public sénégalais ne permettrait pas d’envisager une telle défiance qui risquerait de disjoncter un État encore en construction et dont les populations majoritairement moins nanties vont remplir désespérément la liste des pays pourvoyeurs d’immigrants à destination principalement d’Afrique et d’Europe Occidentale. Une implication directe ou indirecte des partenaires multilatéraux du Sénégal afin de contrarier une telle initiative si elle venait à éclore n’est pas à exclure. Sauf…?

   Qu’en est-il alors du climat politique en cours au Sénégal?

   Sans rentrer dans les détails des évènements de mœurs et de droit qui ébrèchent présentement et fort malheureusement, à tort ou à raison, l’image du potentiel candidat à la prochaine élection présidentielle de 2024 l’honorable député Ousmane Sonko, un père de famille connu publiquement pour être un homme marié à deux femmes. Quoique l’on dise, nous retiendrons qu’en manière de machination ou de complot politique, il n’est pas à exclure qu’il pourrait y avoir eu un concours d’initiatives isolées ou complexes d’intérêts individuels ou croisés dans le but d’immobiliser l’élan politique d’un homme qui rassemble et qui donne espoir à une génération de sénégalais qui espèrent une égalité de chance et de meilleurs lendemains dans un pays pourtant riche en opportunités et ouvert sur le monde grâce à ses potentialités géopolitiques, démographiques et énergétiques entres autres atouts.

   Pour avoir toujours été un peuple d’accueil et d’immigrants, nous portons également peu d’intérêt à la thèse selon laquelle les attaques perpétrées contre les enseignes agro-alimentaires occidentales et françaises en particulier, lors des manifestations populaires en soutien à Ousmane Sonko, cacheraient derrière une tentative de repoussement du peuple sénégalais contre les entrepreneurs et les entreprises étrangers. Vu sous un autre angle, eu égard à la précarité sociale en présence dans le pays et ce depuis des décennies; comme partout dans le monde lors de ces types de manifestations publiques, il n’est pas rare de constater des casses et des attaques contre des enseignes commerciales quelles qu’elles soient.

   D’ici ou avant 2024, il est fort à parier que la crise politique qui s’ouvre actuellement dans le pays entre le régime du Président Macky Sall (2012-2024) et les partisans du député Ousmane Sonko qui «s’» est empêtré dans des procès judicaires ou «politiques», donne lieu à de fortes contestations populaires qui risqueraient d’affecter lourdement aussi bien l’image d’un homme d’état qui a une haute vision pour son pays, qu’un régime politique qui pourrait voir son avenir défleurir au fil des jours et des mois.

   Partant, dans le souci d’un avenir plus serein, le Sénégal a en effet tout à gagner en s’unissant pacifiquement pour affronter ensemble les problématiques urgentes et contemporaines de développement et d’éradication de la pauvreté et auxquels font face en permanence des populations trop souvent laissées pour compte et qui mériteraient plus d’espérance et plus d’équité sur tous les plans, qu’ils soient sociaux, sanitaires, éducationnels, professionnel, etc.

   Somme toute, tandis que certains pays d’Afrique francophone tels que la République Démocratique du Congo, avec à sa tête un homme de grande envergure institutionnelle, Félix Antoine Tshisékédi (2018-2023), qui a su innover pour sortir son pays du gouffre politique dans lequel il se trouvait depuis près de vingt-et-un (21) ans, pour ensuite le lancer dans l’arène des grandes sociétés civilisées et tournées vers le progrès, le développement intégral, la liberté économique et l’humanisme comme fondement aux politiques publiques; il serait assez déplorable de voir un pays longtemps modèle de démocratie sombrer quelque part dans une voie trop souvent empruntée par quelques kleptocraties africaines vomies par les populations et une nouvelle génération[1] d’africains comme au Congo-Brazzaville où d’ailleurs l’opposition menée par le libéral et député Guy Brice Parfat Kolélas est sûre de l’emporter à la prochaine élection présidentielle des 17 et 21 Mars 2021 dès le 1er tour, permettant ainsi à ce pays d’Afrique centrale de rejoindre le très restreint club des pays en voie de démocratisation[2] dans cette partie d’Afrique francophone ou d’influence française encore dite fançafrique. Puisse donc, ce mois de Mars, mois de la Femme, nourrice, épouse, grand-mère, mère, fille et sœur, apporter plus de liberté et de démocratie pour tous et pour une Afrique qui le mérite bien.

Christopher Jivot Bitouloulou-Julienne Ntsouli Ngambio


[1] Cercle littéraire Encre Azurée (Le CLEA), Amiral Kinz et Christopher Jivot Bitouloulou-Julienne Ntsouli Ngambio (Dir.), in Demain nous voici, Anthologie de la littérature congolaise, Les impliqués Éditeur, Paris, 2021, 140 pages.

[2]Issau Agostinho, Ana Magdalena Figueroa, Mark Amaliya Anyorikeya, Christopher Jivot Bitouloulou, Chibueze Ofobuike, in Democratization’s trajectory through change and continuity in Sub-Saharan Africa, Nuova Cultura, Roma, 2017, 188 pages.

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