Comparaison entre la jurisprudence de la «Corte Costituzionale» italienne et du Conseil Constitutionnel en matière de laïcité.

Qu’est-ce que la laïcité? Il est difficile de répondre à cette question de manière claire étant donné la pluralités de facettes dont ce concept fait l’objet tant au niveau temporel que géographique. D’où l’importance d’intensifier des études comparatives autour du sujet d’espèce qui peuvent proposer de nouveaux instruments de lecture et de nouvelles interprétations capables de donner à l’adjectif «laïc»  une connotation autant conforme que possible aux libertés individuelles.


   En même temps, des études de cette nature répondent à une exigence plus large visant à tracer des lignes de conduite sur lesquelles bâtir une intégration européenne entre les Etats membres. Afin de poursuivre ce propos, nous avons décidé  d’avancer une analyse comparative entre la jurisprudence de la Corte Costituzionale italienne et du Conseil Constitutionnel français. En effet, la France et l’Italie représentent deux points de référence, même si aux antipodes, auxquels les autres pays européens s’inspirent pour donner application et définir le principe de laïcité et, plus en général, gérer le phénomène religieux.

   La première constatation concerne les difficultés observées, dans les deux jurisprudences, pour traduire e principe de laïcité dans la théorie à la praxis. Et cela parce que l’on assiste, dans les deux réalités, à un «manque d’homogénéité dans les revendications»[1] des acteurs. De ce fait, que ce soit dans le panorama italien ou dans l’espace français, on retrace: à la fois, ceux qui agissent en défense de la laïcité et de la neutralité étatique, bien que cette action finisse par devenir synonyme d’atténuation des particularités individuelles, et à la fois, ceux qui deviennent les porte-parole d’une laïcité contemplant la présence du religieux dans la société. Il s’agit d’une impasse, cette dernière, qui devient la conséquence de nouveaux défis que les dynamiques de la «citée globale» ont proposé et proposent à tous les pays européens.

   Cependant, s’il est possible de retracer des ressemblances entre les deux jurisprudences à propos de la difficulté à définir clairement ce qu’est la laïcité, on ne peut pas faire de même au niveau de l’approche argumentative. La Corte costituzionale italienne, en effet, a défini, dans l’arrêt leading case en matière de laïcité n.203/89, une neutralité étatique et un principe de laïcité qui implique un rôle actif de l’Etat dans la protection du phénomène religieux. Or, le Conseil onstitutionnel a suivi une autre tendance. Premièrement, celui-ci ne s’est exprimé à propos du principe de laïcité qu’en 2013 à l’occasion de l’arrêt n.297 QPC. Par cette décision, le juge a affirmé que «le principe de laïcité impose surtout le respect de toutes les croyances religieuses….. et que la République reconnait la liberté de culte». Par ailleurs, il a également réitéré l’idée selon laquelle «l’Etat e reconnaît ni ne subventionne aucun culte ». Une considération celle-ci qui rentre, évidemment, en contraposition avec le jugement pris par le Conseil Constitutionnel dont la vision consiste à dire que l’art. VII de la loi, 18 germinal an X, concernant la rémunération des ministres de culte, est conforme au principe de laïcité ainsi qu’il a été reconnu par la loi du 1905. Le juge, de ce fait, se sert d’argumentations qui soutiennent une laïcité maximaliste, mais il encourage plutôt une laïcité dans le sens minimaliste qui implique un rôle actif de l’Etat en faveur de la liberté religieuse. Dans ces conditions, ce qui se réalise est une évidente incompatibilité entre la théorie et la praxis.

   Un autre élément à citer est surement la différence d’approche à propos des thématiques qui tournent autour notamment du blasphème et de l’usage des signes religieux. La Corte Costituzionale italienne en effet, a joué envers la première de celles-ci un rôle fondamental dans le processus de redéfinition de la matière au niveau législatif. Envers la deuxième au contraire, le juge constitutionnel, en vertu de la nature stratégique du thème, a pris soin de n’exprimer aucune considération sur le mérite tout en jugeant, finalement, infondée la requête de contrôle constitutionnel présentée par le Tar del Veneto sur les articles 118 et 119 des décrets royaux n matière d’affichage obligatoire du crucifix dans les espaces publics t dans les écoles. Par ailleurs, concernant la question des signes religieux utilisés par la personne, l’Italie n’a ni ne législation spécifique qui accueille ou même interdise le port de ceux derniers par les individus, ni une remarquable jurisprudence à cet égard. Or, le Conseil Constitutionnel français, de son coté, a exprimé non seulement un arrêt explicite sur la légitimité constitutionnelle, même si avec réserve, s’agissant  de la loi interdisant la dissimulation du visage, mais il a aussi déclaré que l’interdiction du port des signes religieux dans l’espace public  respecte les principes de liberté d’expression et de conscience. A propos de l’interdiction du blasphème, au contraire, le Conseil Constitutionnel n’est pas concrètement intervenu en laissant agir plutôt le législateur qui a opté pour un régime reconnaissant à chaque citoyen la possibilité d’exprimer des jugements contraires à une religion et en interdisant seulement l’injure envers une communauté. 

   Ces remarques visent à constater ue les deux jurisprudences constitutionnelles analysées présentent des éléments de réflexion critique et qu’il serait nécessaire de réévaluer la matière de la laïcité d’une façon plus communautaire qui soit capable de reconsidérer le fait religieux afin d’assurer à la fois, la neutralité de l’Etat à la fois les diversités de tous les citoyens. 

Mariangela Rosato


[1] S.SICARDI, Il principio di laicità nella giurisprudenza della Corte costituzionale (  rispetto alla posizione dei giudici comuni),  2007/2, pag 12.

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